À la conquête de la planète Mercure
Le 19 Octobre 2019 marque le premier anniversaire du lancement par Ariane 5 à Kourou de la sonde Européenne Bepi Colombo, en route vers la planète Mercure qu’elle atteindra dans 7 ans !
L’immense défi européen (ESA) en coopération avec le Japon (JAXA), pour mieux connaître une planète difficile à observer de la Terre et difficile d’accès.
De l’observation terrestre aux premières sondes
Visible uniquement une heure avant le lever du Soleil ou une heure après son coucher, la connaissance de Mercure était difficile. L’évolution des lunettes astronomiquesa permis d’établir les premières cartographies comme celles d’Eugène Antoniadi, en 1934, grâce à la grande lunette de Meudon, qui servaient de référence avant les observations de la sonde Mariner 10 lancée par la NASA le 3 Novembre 1973.
Assistance gravitationnelle et premières découvertes lors de survols de Mercure par Mariner 10.
C’est Giuseppe Colombo, dit Bepi (1920-1984), mathématicien et ingénieur italien, qui a calculé le trajet de Mariner 10 avec l’assistance gravitationnelle de Vénus pour survoler Mercure en mars 1974 (à 704 km) et en mars 1975 (à 327 km). Mariner 10 a photographié 40% de la planète, détecté un champ magnétique et mesuré une densité suggérant que le noyau de Mercure est extrêmement gros. Les survols trop brefs et l’instrumentation limitée n’ont permis qu’une approche globale parcellaire de Mercure.
Première mise en orbite en 2011 d’une sonde pendant 4 ans, « Messenger » : le grand bond en avant.
La NASA lance le 3 Août 2004 la sonde Messenger,qui après 7 ans de voyage et les assistances gravitationnelles de Vénus et de la Terre, s’est mise en orbite autour de Mercure en 2011. L’orbite de Messenger, près du pôle Nord, loin du pôle Sud a permis de cartographier la surface entière de Mercure, de détecter une présence de glace d’eau à l’intérieur de certains cratères du pôle Nord où il fait -180° et des écarts de température allant jusqu’à +430 ° aux endroits exposés au soleil , non protégés par la trop fine couche de gaz de l’exosphère (O2, H2, Na,He, K) . De nombreuses cheminées volcaniques témoignent d’une importante activité interne passée. Le champ magnétique (dipôle) rappelle celui de la Terre. A court d’ergols, Messenger s’est écrasé sur le sol de Mercure en avril 2015.
La moisson scientifique de Messenger a permis un sérieux bond en avant de nos connaissances de Mercure, tout en laissant en suspens encore de nombreuses énigmes.
Mission « Bepi Colombo »: explorer les mystères de Mercure.
BepiColombo comporte 2 orbiteurs: MPO (Mercury Planetary Orbiter) européen et MMO (Mercury Magnetospheric Orbiter) japonais, et aussi un module de transport MTM (Mercury Transfer Module) européen protégé par un bouclier thermique, avec de grands panneaux solaires, 4 propulseurs électriques et des propulseurs chimiques.
Après un voyage de 8,5 milliards de kilomètres à la vitesse de 120 000 km/h, combinant l’assistance gravitationnelle {Terre + Vénus + Mercure}, MTM sera éjecté à l’approche de Mercure fin 2025. Les orbiteurs scientifiques commenceront alors leur mission nominale d’un an.
Un défi technologique immense face à la proximité du soleil.
Pour Frank Budnik, expert ESA en dynamique de vol, la gestion des grands panneaux solaires qui alimentent le moteur du MTM est presque aussi compliquée que le périple de la sonde. Leur angle d’inclinaison est essentiel pour résister aux températures extrêmes (– 170 °C, + 450 °C) aux abords de Mercure.
Une grande Mission Scientifique.
MMO, tournant sur lui-même pour se refroidir, étudiera avec ses 5 instruments l’environnement externe (magnétosphère, atmosphère, poussières, vent solaire).
MPO, doté d’un immense radiateur pour évacuer la chaleur et de 11 instruments dont 8 conçus par des laboratoires français, comme le spectromètre français Phebus, du Laboratoire Latmos (atmosphères, milieux, observations spatiales), se concentrera sur la surface et la structure interne.
La mission BepiColombo complétera celle de Messenger, notamment sur la topographie et la composition de la surface de Mercure et étudiera, à 10 ans d’intervalle, les changements, comme au niveau des dépôts (glace d’eau ?).
Les orbiters coordonneront leurs observations sur l’étude du champ magnétique de Mercure et son interaction avec le Soleil et le vent solaire.
Les résultats scientifiques de cette extraordinaire mission internationale permettront de mieux comprendre la formation de notre Système Solaire et l’évolution des planètes à proximité de leur étoile, comme les « exoplanètes ».
En attendant 2025, des évènements exceptionnels ont été proposés aux astronomes amateurs, en particulier de Jalle Astronomie, grâce aux trajectoires relatives de Mercure, de la Terre et du Soleil, qui ont permis d’observer depuis la Terre le transit de Mercure devant le Soleil. Un transit le 9 mai 2016 puis un autre le 11 novembre 2019_ malheureusement ennuagé à Martignas_. Le prochain n’aura lieu qu’en 2032.
La vidéo suivante de la NASA illustre le transit du 11 novembre 2019
Texte et images: Michel Drobycheff, mise en forme et publication: Michel Vidal