L’observatoire de Jalle Astronomie à l’heure d’Eurybate.
L’observatoire de Jalle Astronomie à l’heure d’Eurybate.

L’observatoire de Jalle Astronomie à l’heure d’Eurybate.

 L’Observatoire de Jalle Astronomie a participé dans la nuit du 23 octobre à l’occultation de l’étoile HD 51593 par l’Astéroïde Eurybate à la demande de L’AFA.

Premier Contact :

Début Mars, notre association a été contactée par l’AFA pour participer à une manifestation d’intérêt national – AFA / Sciences participatives. L’objectif de cette manifestation est l’observation d’occultation d’astéroïdes Troyens de Jupiter en collaboration avec les acteurs de la mission LUCY, financée par la NASA. Cette mission a pour objectif l’observation rapprochée de certains astéroïdes Troyens. Il s’agissait là d’une grande opportunité de participer à la recherche avec des professionnels. De plus, il nous a été notifié que notre observatoire se situait sur le passage de la cible Eurybate qui occultait une étoile le 23 octobre 2022.

Après avoir pris quelques renseignements sur les modalités et les attendus, nous avons décidé de répondre favorablement à cette sollicitation. Une première pour Jalle Astronomie !!

Rappel :

De temps en temps, un astéroïde troyen en orbite autour du Soleil, passe brièvement devant une étoile. Pendant quelques secondes, alors que la Terre, l’astéroïde et l’étoile s’alignent parfaitement, l’astéroïde projette une ombre sur la Terre. Ce phénomène s’appelle une occultation. Ces occultations sont particulièrement importantes pour la mission Lucy, car trouver et mesurer les ombres projetées par les astéroïdes signifie épingler précisément les positions des astéroïdes visés par la sonde Lucy. Lors d’une occultation, l’astéroïde bloque une étoile si éloignée que l’ombre projetée sur la surface de la Terre est extrêmement proche de la taille de l’astéroïde lui-même. Nous ne pouvons pas choisir où l’ombre tombera, de sorte que les équipes d’astronomes doivent souvent se rendre aux endroits où l’ombre est prévue. L’objectif est que les équipes d’observation s’étendent dans la région d’ombre prédite, puis dirigent leurs télescopes vers l’étoile occultée. Les professionnels font donc appel aux amateurs pour augmenter le nombre de postes d’observation et étendre leur chance de capter le phénomène.

L’observation d’une occultation stellaire permet d’obtenir les dimensions d’un astéroïde. Cette mesure a deux grandes qualités :

  • Elle est directe, pas d’hypothèse à émettre, juste à observer,
  • Très précise, à titre d’exemple la vitesse angulaire d’un astéroïde de la ceinture principale tourne autour de 30 secondes d’arc par Heure. Avec une précision de chronométrage de l’ordre de 0,1 sec on obtient une précision angulaire de moins 1 milliseconde d’arc.

A comparer aux résolutions des meilleurs télescopes terrestres qui sont d’environ 40 millisecondes en image directe.

La préparation :

L’équipe de l’observatoire commença donc à récolter toutes les infos techniques nécessaires afin de vérifier dans un premier temps si le matériel disponible dans l’observatoire était compatible.

Une première Réunion avec l’AFA début Juillet nous a permis de connaitre les différentes configurations nécessaires pour une bonne observation et de sélectionner notre catégorie d’appartenance. L’équipe décida donc de se positionner sur la catégorie « Panoplie complète » nous imposant de répondre aux exigences suivantes :

Matériels :

  • Une lunette ou un télescope
  • Une caméra pilotée par logiciel pour produire des fichiers SER (vidéo) ou FITS.
  • Une monture (motorisée de préférence)
  • Optionnel : une Timebox de la marque Shelyak pour une précision temporelle maximale. Ou une caméra avec horloge GPS intégrée.

Type de données à retourner :

  • Position géographique Précise
  • Dates de début et de fin de l’occultation (précision temporelle estimée = 10 à 20 ms)
  • Optionnel : courbe de lumière obtenue grâce au logiciel Tangra

 

Nous nous sommes donc attachés à télécharger les logiciels nécessaires (Tangra, OccultWatcher …) et à nous former pour le Jour J. Des tests ont été menés pour connaitre précisément l’horodatage de nos PC et calculer l’écart résiduel entre l’heure affichée des acquisitions et l’heure réelle.

Autre amélioration apportée, le pointage et pilotage du télescope via le PC. Les fonctions étaient disponibles mais l’équipe manquait d’expérience sur ce type de manipulation car le pilotage de nos observations se fait principalement avec notre boitier Argo Navis.  Quelques soirées tests plus tard, nous étions formés et prêt pour viser notre cible : L’étoile HD 51593.

Le télescope et les PC étant prêts, nous avons poursuivi nos tests sur le ciel dans la constellation des Gémeaux pour nous familiariser avec notre cible et ses étoiles environnantes. Après avoir fait une première recherche en visuel par saut de puce, nous avons découvert notre étoile. Une deuxième observation avec visée assistée par PC nous a permis de confirmer que notre première visée manuelle était elle aussi parfaite. Une grande satisfaction pour l’équipe.

Nos yeux étant rompus à la zone à observer, nous pouvions donc passer à l’étape suivante, les essais d’acquisitions avec notre camera QHY.

Entre temps, 2 webinaires supplémentaires, toujours organisés par L’AFA, nous ont permis d’avoir les derniers conseils pratiques puis une formation rapide sur le logiciel TANGRA.

La partie acquisition n’a pas été l’étape la plus difficile de notre mission. En effet nous avons pu compter sur l’expérience du groupe en astrophotographie pour obtenir rapidement les bons réglages demandés.

Image extraite d’un film test faisant apparaitre l’étoile cible et des étoiles environnantes.

 

Notre principale difficulté était d’obtenir un film compatible des logiciels de mesure afin de sortir les courbes de luminosité.

Après quelques essais, nous sommes arrivés à établir le bon format de film, permettant d’avoir la vitesse d’acquisition souhaitée, et compatible du logiciel de mesure Tangra conseillé par les tuteurs professionnels.

Avec ces derniers paramètres acquis, nous étions enfin prêts pour notre Rendez Vous du 23 octobre.

Illustration :

Sélection de l’étoile occultée, (bleu) et des étoiles de comparaison (jaune et verte)

 Ci-dessus, les courbe de luminosité de 3 étoiles sont illustrées, la courbe Bleue montre l’étoile occultée pendant environ 5 secondes et tandis que les courbes Jaune et Verte montrent 2 étoiles de comparaison.  Les étoiles de comparaison sont nécessaires pour vérifier que la perte de luminosité soit ciblée sur l’étoile étudiée et non sur la zone observée à cause par exemple d’un passage de nuage, d’un oiseau, avion…. (Perte de luminosité de toutes les étoiles dans ce cas).

 

Le JOUR J ……

Cette nuit du 23 octobre devait être très excitante, mais l’excitation a vite laissé place à l’angoisse. En effet, une dernière réunion conseil organisée la veille nous a refroidis : les prévisions météo étaient mauvaises, sur toute la région et le territoire. Malgré cela notre RDV était maintenu à 3h00 pour l’initialisation de notre setup et faire l’acquisition tant attendue à 4h02 précise.

A notre arrivée les nuages étaient présents avec quelques trous nous permettant de voir quelques étoiles. Il ne nous en fallait pas plus pour faire la mise en station du 640, initier les logiciels de pilotage et de suivi puis viser notre étoile.  Une fois celle-ci parfaitement centrée dans l’oculaire, la mise en place de la caméra n’a pas tardée. L’équipe s’est alors regroupée au rez-de-chaussée pour plonger notre télescope dans l’obscurité et éviter toute lumière parasite sur l’enregistrement. Hélas, nous ne verrons jamais apparaitre HD51593 dans le champ de la caméra. La faute aux nuages qui avaient repris complètement le dessus après nous avoir donné quelques espoirs en début de séance.

Quel dommage d’avoir une telle conclusion pour cette première expérience d’occultation. Comme prévu, le rapport officiel a été envoyé à l’AFA, et nous sommes désormais en attente des résultats nationaux prévus pour mi-novembre.

L’équipe de l’observatoire concentrée sur les derniers réglages avant l’occultation

Et maintenant :

N’ayant pas pu transformer notre essai sur cette première occasion, l’équipe va se concentrer désormais sur une prochaine occultation (à déterminer) pour sortir nos premières courbes de lumière et être fin prêt pour les prochaines sollicitations. Jalle Astronomie peut maintenant s’ouvrir à l’observation d’Exoplanètes.

 

Remerciements :

Un grand Merci à Marie et Guillaume de L’AFA pour avoir sollicité Jalle Astronomie pour cette première expérience nationale et nous faire découvrir les travaux sur les Exoplanètes.

Un grand merci à Didier G.  Serge H. et Jean Luc B. pour leur mobilisation et leur dévouement sur ce projet qui nous a permis de répondre très positivement à nos demandeurs et d’améliorer encore notre outil observation.

 

Rédaction  F. Maillard le 25 octobre 2022 pour Jalle Astronomie.

 

 

Mission Lucy en bref ….

Lucy est une mission spatiale de l’agence spatiale américaine, la NASA, dont l’objectif est d’étudier en les survolant six astéroïdes troyens de Jupiter, qui sont positionnés aux points de Lagrange L4 ou L5 de cette planète. Le projet proposé par le Southwest Research Institute (SWRI) a été sélectionné en 2017 dans le cadre du programme Discovery qui rassemble les missions d’étude du Système solaire américaines à coût modéré. La sonde spatiale lancée le 16 octobre 2021 doit survoler les différents astéroïdes entre 2027 et 2033.

Lucy est le premier engin spatial à s’approcher des astéroïdes troyens. Ces corps célestes aux caractéristiques hétérogènes seraient, selon le modèle de formation du système solaire dit de Nice, des objets qui étaient situés initialement dans différentes parties du système solaire dont certains dans la ceinture de Kuiper, au-delà des planètes externes. Ils auraient été déplacés aux points de Lagrange de Jupiter par le mouvement des planètes gazeuses géantes survenu dans les premiers âges de notre système solaire. Si cette modélisation est exacte ces astéroïdes seraient composés des matériaux primitifs qui se sont agrégés au début de l’histoire du Système solaire. Quatre des corps survolés sont de type D et P, catégories d’astéroïdes qui n’ont jamais été étudiées jusque-là. Deux de ces astéroïdes forment un système binaire.

La sonde spatiale, fabriquée par Lockheed Martin, a une masse de 1,5 tonne dont plus de 700 kilogrammes d’ergols utilisés pour les différentes corrections de trajectoire nécessaires pour survoler ses objectifs. Le corps de la sonde spatiale est un parallélépipède de 1 à 2 mètres de côté supportant deux immenses panneaux solaires circulaires de 7 mètres de diamètre dont la surface permet de compenser l’éloignement du Soleil lors des survols. Lucy emporte trois instruments scientifiques, qui avaient été mis au point pour la mission New Horizons lancée en 2006 et qui sont installés sur une plateforme orientable : un spectromètre-imageur fonctionnant dans le visible et le proche infrarouge, une caméra à haute résolution, et un spectromètre observant dans l’infrarouge thermique. Ces instruments doivent déterminer la composition de la surface, sa géologie, les caractéristiques générales (masse, densité, …) et détecter la présence d’éventuels satellites ou anneaux. La mission doit affiner notre connaissance des astéroïdes troyens et plus généralement de la population des astéroïdes et permettre de disposer de nouvelles données sur les premiers corps créés lors de la formation du système solaire. L’objectif ultime est de contribuer à valider le modèle de Nice ou à défaut d’apporter des éléments pour contraindre un nouveau modèle de formation du système solaire.

Lucy va plus précisément viser huit astéroïdes différents au cours de sa mission : un astéroïde de la ceinture principale (située entre les orbites de Mars et de Jupiter), ainsi que sept astéroïdes troyens. « Aucune autre mission spatiale dans l’histoire n’a été lancée vers autant de destinations différentes sur des orbites indépendantes autour de notre Soleil », selon la Nasa.

La sonde se dirigera d’abord vers le « camp grec » des troyens de Jupiter. Elle survolera (3548) Eurybates et son satellite Queta en août 2027, (15094) Polymele en septembre 2027, (11351) Leucus en avril 2028, puis (21900) Orus en novembre 2028. La mission reviendra ensuite vers l’orbite de la Terre : quand Lucy sera de nouveau dirigée vers l’extérieur, Jupiter et ses troyens auront bougé. Il ne lui restera plus qu’à passer à travers le « camp troyen » : Lucy s’approchera de (617) Patroclus et de son compagnon Menoetius en mars 2033.

Extrait Wikipédia et Numerama